(Islande)
<<"Look", my father said. "Look at the lava". What's there to see ? It's just lava, I thought. (...) What is the big deal ? Endless lava, endless moss. Endless
wilderness.
"Look at this volcano lake. Feel the peace and quiet. And it's a great place to catch some Salmo trutta" said my father.
Salmo Trutta ? Give me a hamburger and French fries. (...)
Driving on, boring boring.
"Listen to the silence."(...)
The island of adventure was right in front of me. It was too close to see and sense its magic. It was home. And still is.
Look. And see.>>
Arni Thorarnisson, extrait de préface du livre Iceland small world.
J'ai accompli un rêve. Pas un vieux rêve comme certains vous le diront, mais un rêve quand même. Je suis parti découvrir quelque coin d'Islande, île mythique s'il en est, à cheval entre Amérique
et Europe, proche du cercle polaire. Au fond, c'est la même ferveur qui m'a poussé à aller en Colombie britannique, sur l'île de Vancouver, ou encore en Alaska.
"On ne choisit pas ses lieux de prédilection, on est requis par eux. (...) Il existe toujours une géographie qui correspond à un tempérament."
Michel Onfray, Théorie du voyage
Donc je suis parti pour sept jours en Islande, un voyage assez court, essentiellement pour des questions de budget car j'ai loué seul une voiture. Je suis parti seul même si à la base j'aurais
préféré partir avec un compagnon. A deux il me semblait que ce fût idéal. Mais finalement l'expérience a été bonne et je ne le regrette pas. Si j'avais attendu quelqu'un, sans doute ne serais-je
pas parti avant l'été prochain... Je n'aurais pu attendre... Du reste, je me suis focalisé sur la partie nord de l'Islande. J'ai donc une bonne excuse pour y retourner afin de voir le Sud,
peut-être plus tôt que je ne le pense, et cette fois, qui sait, accompagné.
Le premier jour a été plutôt fatiguant
après un lever un 5h, le vol à 8h et une arrivée à 9h15 locales (décalage de deux heures) en Islande. Je récupère rapidement la voiture à côté de l'aéroport sous une pluie battante et un vent
fort. Il doit faire 8 degrés, un temps normal à Paris en février. Je fais les 50km qui me séparent de la capitale la plus septentrionale du monde, Reykjavik. En dehors de la deux fois deux voies,
visions surréaliste de champs de lave. Je me crois sur la lune, enfin sur une voie rapide sur la lune. Très vite, une éclaircie apparait, laissant transparaître la neige des fjords au loin.
Je trouve refuge dans un petit boui-boui sympa devant le port où je commande un hamburger avec frites, pas de la grande gastronomie (de toute façon les restos sont hors de prix ici) mais
providentiel après un petit déjeuner déjà bien loin. A côté de moi je rencontre un français qui a encore plus faim que moi et commande un dessert au chocolat qu'il a tôt fait d'engloutir. Il y a
également des jeunes islandais qui ont l'air coutumiers des lieux et de nourriture américaine également... Je ne fais pas de vieux os dans la capitale et file direction plein nord. Ah le nord,
que ne nous a-t-il pas fait rêver !
Les 200km de route qui m'emmènent à l'auberge
sont pour moi étranges avec la fatigue et la solitude des lieux désolés que je traverse. Je mets parfois 15min avant de croiser une voiture... Je pense à Sylvain Tesson que je cite de mémoire
"Le silence, le froid et la beauté seront le luxe de demain.". Je m'arrête souvent pour prendre des photos, je teste mon filtre neutre sur une cascade assez banale le long de la route.
Je laisse la voiture ouverte quand je m'éloigne un peu. Qui voudrait d'une petite dodoche comme j'ai ici ? Et puis, et enfin, vers 19h, je trouve mon auberge, simple mais très sympathique. Une
très bonne soirée ici avec la compagnie de retraités anglais qui m'offrent un whisky, celle d'un écossais de retour des fjords du nord-ouest, et deux français qui finissent le tour de l'île. Dans
un petit bassin (hot tub), l'eau des sources chaudes permet un bain gratuit à toute heure, devant l'eau de l'arctique. Je ne me fais pas prier. L'eau a des senteurs de souffre (oeuf pourri). Quel
bonheur !
Je sors de l'eau, il doit faire 5 degrés, je suis dehors et devant moi un bout d'arctique, j'aime ces situations improbables, un véritable luxe. En vrai, le vent souffle si fort qu'on est sec en
30s, mais étant frileux de première catégorie, je vais me doucher dans une cabane dehors. A propos des bains chauds, je dis à un anglais qui vient de fêter ses 70ans "It's perfect before the
night." Il me répond "Well, there's no night." Je ris. Pas de nuit ici, juste une soleil qui fait semblant de se coucher pendant deux ou trois heures. Je suis à presque 66 degrés nord !
Le lendemain, je continue ma route vers Akureyri, la deuxième ville d'islande avec 17000 habitants, située au nord. Succession de paysages superbes, neige se retirant, beaucoup de chevaux. Je
vais à la piscine de la ville le soir. Il fait 8 degrés, du vent. La piscine est extérieure, avec de l'eau bien sûr chaude, mais piscine extérieure tout de même ! Quand je pense qu'en France on
attend qu'il fasse 25 degrés pour découvrir une piscine... Je me paye le luxe de nager 1km dans le bassin d'Akureyri. En brasse, à chaque respiration, je sens le frais sur mes cheveux et je vois
les montagnes enneigées... Expérience unique. Unique comme l'obligation de se déshabiller sous la douche et de se frotter au savon aux parties explicitement indiquées : sexe, fesse, aisselles,
pieds... Tout le monde le fait, ni une ni deux, je le fais. Cela me rappelle le Canada. Il y a tout un monde, des gros, des vieux, des jeunes, tous culs nus ! Je n'aurai pas de photo de la
piscine même si ça aurait valu le coup, les appareils sont interdits.
La suite, je continue mon périple vers la région du lac Myvatn. Tout n'est que succession de paysages magnifiques, de fermes isolées. Je ne m'en lasse pas. Un matin, je manque de perdre mes clefs
de voiture, je les cherche pendant deux heures avant de les retrouver dans une poubelle. Plus tard, j'accuserai les esprits du lac ou quelques trolls passant par là. Et on ne sait jamais avec les
elfes. Tout n'est pas scientifiquement expliquable ici. Il faut aussi demander si les pistes sont ouvertes, même si cela n'empêche pas de se retrouver bloqué comme je le fus à cause d'un col pas
encore ouvert... "Moi qui le plus souvent voyage pour le plaisir, je ne me guide pas si mal". Montaigne, III,
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Voilà pour une première partie de mon récit de voyage. Il y en aura une autre sans doute. A bientôt donc, lecteur, et bon vent !